3ᵉ édition des Trésors des arts traditionnels marocains

À Rabat, le patrimoine reprend vie. Sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, la 3ᵉ édition du programme “Trésors des arts traditionnels marocains” vient d’être lancée, confirmant l’engagement du Royaume à sauvegarder ses savoir-faire ancestraux. Partenariat renforcé avec l’UNESCO, métiers rares mis à l’honneur, jeunesse au cœur de la transmission : cette nouvelle édition marque un tournant décisif pour l’avenir des arts traditionnels marocains.

Un lancement sous le Haut Patronage royal pour préserver un héritage vivant

À Rabat, la cérémonie d’ouverture s’est déroulée dans une atmosphère à la fois solennelle et profondément symbolique. L’édition 2025 est placée sous le thème “De l’héritage des ancêtres à la créativité des descendants : une jeunesse qui préserve l’identité marocaine”. Une formulation qui résume l’ambition du programme : assurer la rencontre entre les porteurs de traditions séculaires et ceux qui en seront les héritiers.

Organisé par le Secrétariat d’État chargé de l’Artisanat et de l’Économie sociale et solidaire, en partenariat avec l’UNESCO, le programme s’inscrit dans la continuité d’un effort national stratégique visant à protéger les métiers d’art menacés de disparition. Il vise surtout à leur redonner une place centrale dans le développement humain, social et économique du Maroc.

Le cadre institutionnel, renforcé par la prolongation du partenariat Maroc–UNESCO jusqu’en 2031, témoigne de la volonté du Royaume d’inscrire cette initiative dans la durée. L’artisanat y est considéré non comme un vestige du passé, mais comme une composante vivante de l’identité marocaine.

Un programme pour sauver des métiers menacés et transmettre des savoir-faire rares

Quinze nouveaux métiers à forte valeur patrimoniale

Cette troisième édition met en lumière quinze métiers qui, pour beaucoup, ne subsistent plus que grâce à une poignée de maîtres-artisans. Les arts équestres, par exemple, sont représentés par des spécialistes de la mokahla, des étriers ou des structures de selle, témoignant de l’importance de la tradition équestre dans la culture marocaine.

Le domaine du cuir voit, lui, la reconnaissance d’un savoir-faire du Sud particulièrement menacé, tandis que le travail du bois distingue un maître de la marqueterie sur thuya. Le tissage et le textile, toujours au cœur des arts traditionnels marocains, rassemblent un ensemble de pratiques rares : tapis Beni Ouarain, haïk souiri, bernous de Figuig, nattes traditionnelles, tapis rbati, zouaq ou encore teinture végétale.

S’il reste difficile de mesurer l’étendue réelle du risque de disparition de ces métiers, leur présence dans le programme montre la volonté du Maroc de ne pas perdre les gestes, les couleurs et les matières qui composent son héritage immatériel.

Les maîtres-artisans, gardiens d’un patrimoine immatériel

Depuis sa création, le programme a déjà distingué 32 maîtres-artisans considérés comme des “trésors vivants”. Leur rôle dépasse largement la démonstration d’un savoir-faire : ils incarnent une mémoire, une discipline et une vision du monde façonnée par des siècles de transmission.

Lors des deux premières éditions, ces maîtres ont formé 157 jeunes durant neuf mois. Avec l’arrivée de 150 nouveaux apprentis en 2025, le total atteint désormais plus de 300 jeunes formés aux arts traditionnels marocains. Une dynamique qui contribue à revitaliser des traditions parfois en voie d’extinction.

Former la relève : une jeunesse au cœur du renouveau des arts traditionnels marocains

150 nouveaux apprentis formés cette année

La 3ᵉ édition confirme l’ambition du programme de renforcer la relève artisanale. Les jeunes sélectionnés bénéficient d’un apprentissage intensif auprès de maîtres-artisans reconnus, dans le respect de l’excellence, de la créativité et de l’authenticité. Ce format permet non seulement d’acquérir les techniques traditionnelles, mais aussi de comprendre leur dimension culturelle et symbolique.

Pour beaucoup de jeunes, ces formations représentent une opportunité professionnelle dans un secteur qui emploie déjà près de 2,7 millions de Marocains. Elles ouvrent aussi la voie à une modernisation raisonnée, où le numérique et l’innovation sont envisagés comme des leviers pour faire rayonner les arts traditionnels marocains.

Une dimension sociale renforcée : inclusion des détenus et élargissement aux régions du Sud

L’édition 2025 introduit une nouveauté majeure : l’élargissement du programme aux établissements pénitentiaires. Grâce à un partenariat entre le Secrétariat d’État, l’UNESCO et la Délégation générale à l’administration pénitentiaire, six détenus artisans expérimentés formeront quatre-vingt-dix jeunes détenus à plusieurs métiers traditionnels, dont le zellige, la sellerie brodée ou la vannerie.

Le programme s’étend également aux provinces du Sud, confirmant sa vocation nationale. La richesse du patrimoine sahraoui, soulignée par les responsables institutionnels, trouve ainsi sa place dans cette dynamique de transmission et de valorisation.

Un partenariat Maroc–UNESCO renforcé jusqu’en 2031

La prolongation du partenariat avec l’UNESCO symbolise la maturité et la crédibilité du programme. L’organisation internationale insiste sur une approche participative : les artisans et les communautés détentrices du savoir définissent eux-mêmes les priorités, les modes de transmission et les mécanismes de préservation.

Ce modèle s’inscrit dans la logique de la Convention de 2003 sur le patrimoine culturel immatériel, qui privilégie la sauvegarde “par” les communautés plutôt que “pour” elles. Le Maroc devient ainsi un exemple régional d’intégration de la jeunesse et des acteurs locaux dans la préservation des traditions.

L’artisanat marocain, une “vraie fortune” nationale en pleine modernisation

Lors de la cérémonie, des voix fortes ont rappelé la profondeur de l’artisanat marocain. André Azoulay a évoqué les artisans comme “la vraie fortune du Royaume”, soulignant leur rôle dans l’identité et la mémoire collective. Il a également affirmé que les mutations technologiques, loin de menacer les arts traditionnels marocains, peuvent les enrichir.

Cette posture traduit une vision contemporaine : l’artisanat ne doit pas être figé dans le passé, mais dialoguer avec son époque. L’intelligence artificielle, la numérisation des ateliers ou la commercialisation en ligne peuvent contribuer à renforcer la visibilité et l’attractivité de ces métiers, à condition de préserver leur âme et leur authenticité.

Une dynamique qui revalorise les arts traditionnels marocains sur la scène nationale et internationale

En trois éditions seulement, le programme “Trésors des arts traditionnels marocains” a réussi à unir institutions, maîtres-artisans, jeunes apprentis et partenaires internationaux autour d’une cause commune : la sauvegarde d’un patrimoine vivant.

La mise à l’honneur de métiers rares, le soutien aux artisans d’exception et l’attention portée aux territoires renforcent le rôle de l’artisanat dans le rayonnement du Maroc. Au-delà de la transmission des gestes, il s’agit de préserver un langage culturel, une manière de vivre et une vision du beau profondément marocaine.

L’enjeu est clair : garantir que les arts traditionnels marocains continuent d’inspirer les générations futures, au Maroc comme dans le monde.