Le Festival des Andalousies Atlantiques d’Essaouira a soufflé ce week-end sa 20ᵉ bougie dans une ambiance à la fois solennelle et festive. Du 30 octobre au 2 novembre 2025, la cité des Alizés a vibré au rythme des musiques andalouses, judéo-musulmanes et méditerranéennes, confirmant son statut de capitale du dialogue interculturel.
Un festival devenu emblématique du vivre-ensemble
Vingt ans d’un héritage musical partagé
Créé en 2003 par l’Association Essaouira-Mogador sous l’impulsion d’André Azoulay, conseiller de S.M. le Roi Mohammed VI, le Festival des Andalousies Atlantiques s’est imposé, au fil des années, comme l’un des rendez-vous culturels majeurs du Maroc.
Cette manifestation avait pour ambition de faire revivre l’héritage andalou en réunissant, sur les mêmes scènes, des artistes juifs et musulmans, marocains et étrangers, portés par une même passion pour la musique et la tolérance.
Essaouira, cité symbole du Maroc pluriel
Essaouira, ville de brassage et d’ouverture, a une nouvelle fois incarné cette vocation universelle. La cité portuaire a renoué, durant quatre jours, avec son rôle de creuset du vivre-ensemble, célébrant un patrimoine musical qui transcende les frontières et les confessions.
Une 20ᵉ édition sous le signe de la transmission et de la tolérance
Une ouverture placée sous le sceau du dialogue
La cérémonie d’ouverture, organisée le jeudi 30 octobre, a marqué un moment fort. Devant une salle comble et un parterre de personnalités marocaines et étrangères, la secrétaire générale de l’Association Essaouira-Mogador, Kaoutar Chakir Benamara, a rappelé que le festival représentait « un pont vivant entre les civilisations », un espace où se côtoient « les mémoires, les sensibilités et les talents du Maroc et d’ailleurs ».
La richesse du répertoire andalous
Le concert inaugural, porté par l’Orchestre Mohamed Larbi Lamrabet de Tanger et plusieurs jeunes artistes, a plongé le public dans la richesse du répertoire andalou, revisitant notamment les œuvres du grand Abdessadek Chekara.
Cette ouverture a donné le ton d’une édition placée sous le signe de la transmission intergénérationnelle : maîtres et jeunes musiciens ont partagé la scène, prouvant que ce patrimoine séculaire restait vivant et fécond.
Temps forts musicaux et moments d’émotion
Un dialogue entre traditions arabe et hébraïque
La programmation de cette édition anniversaire s’est révélée particulièrement riche et variée.
Le vendredi, le public de Dar Souiri a assisté à un moment d’une rare intensité : le duo formé par le chanteur Faysal Benhaddou et le hakham-artiste Marc Marciano a livré un concert tout en sobriété, mêlant arabe et hébreu dans une véritable prière musicale. Un échange empreint d’humanité, où les voix se répondaient comme deux mémoires réconciliées.
Un hommage vibrant aux grandes voix du Maghreb
Le même jour, la scène de la Salle Al Massira a rendu hommage aux grandes voix juives du Maghreb – de Zohra El Fassia à Reinette l’Oranaise, en passant par Samy El Maghribi – sous la direction artistique de Maxime Karoutchi. Cet hommage a rappelé l’importance du festival dans la préservation d’un patrimoine judéo-marocain trop souvent oublié.
Une clôture en apothéose
Enfin, la clôture du samedi soir a offert un moment d’apothéose : la diva Raymonde El Bidaouia a électrisé la foule avec ses grands classiques, avant d’être rejointe par le chanteur Faysal Benhaddou pour un duo émouvant. Le Ballet Flamenco d’Andalousie, dirigé par Patricia Guerrero, a également marqué les esprits avec sa création « Tierra Bendita », offrant un pont artistique entre Séville et Essaouira.
Le Maroc et l’Andalousie unis autour du Pavillon Hassan II
Un protocole d’accord historique signé à Essaouira
Au-delà des concerts, cette 20ᵉ édition a également été le théâtre d’un événement diplomatique et patrimonial d’envergure : la signature d’un protocole d’accord pour la restauration du Pavillon Hassan II à Séville.
L’accord, conclu entre le Secrétariat d’État chargé de l’Artisanat et de l’Économie sociale, la Fondation des Trois Cultures et la Maison de l’Artisan, vise à restaurer et à promouvoir ce monument emblématique, symbole de tolérance et de dialogue entre les rives de la Méditerranée.
Culture et diplomatie, un même langage
Lors de la cérémonie, André Azoulay a salué un « moment fort dans le renforcement des liens historiques entre le Maroc et l’Andalousie », tandis que Patricia del Pozo Fernández, conseillère à la culture du gouvernement andalou, a souligné « le rôle exemplaire du Maroc dans la préservation du patrimoine partagé ».
Ce partenariat a trouvé une résonance toute particulière au sein du festival, qui depuis vingt ans fait dialoguer les traditions musicales, artisanales et spirituelles des deux rives.
Essaouira, capitale vivante du patrimoine andalou
Un modèle de dialogue interculturel
En vingt éditions, le Festival des Andalousies Atlantiques s’est imposé comme un modèle mondial de dialogue interculturel. La ville d’Essaouira, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, y joue un rôle de phare, conjuguant musique, mémoire et ouverture au monde.
Un impact culturel et touristique durable
Cette édition 2025 a réuni une vingtaine de concerts, plusieurs forums intellectuels et une pluralité d’artistes venus du Maroc, d’Andalousie, d’Albanie, de Macédoine ou d’Italie.
Au-delà de sa dimension artistique, le festival a aussi généré un impact touristique et économique positif, consolidant la réputation d’Essaouira comme destination culturelle internationale.
Un week-end sous le signe du vivre-ensemble
Alors que les dernières notes de « Faynak A Lhbib » résonnaient dans la salle Al Massira, le public a longuement ovationné les artistes. Beaucoup y ont vu une métaphore du Maroc : un pays qui sait conjuguer mémoire, modernité et tolérance. Pour André Azoulay, ce 20ᵉ anniversaire incarne « le plus beau cadeau que pouvait espérer Essaouira : une lumière de paix et de dialogue, là où d’autres éteignent la leur ».
Véritable Zyriab des temps modernes, le Festival des Andalousies Atlantiques a une fois encore prouvé qu’à Essaouira, la diversité est une force, la musique un langage universel, et la mémoire un avenir à partager.

