Une conférence très attendue sur le Maroc médiéval à la prestigieuse British Academy de Londres met en lumière une période fondatrice de l’histoire du Royaume. Mais que nous apprennent réellement les nouvelles découvertes archéologiques ? Et surtout, comment l’héritage de cette époque façonne-t-il encore le Maroc d’aujourd’hui ? Plongez dans les secrets d’une période charnière, de la science des archéologues à la virtuosité toujours vivante des artisans.
Un regard neuf sur une période fondatrice
L’histoire n’est jamais figée dans le marbre. Elle se redécouvre et se réinterprète sans cesse grâce à de nouveaux outils et à des perspectives inédites. C’est précisément cette ambition qui anime la communauté scientifique internationale, dont l’intérêt pour le passé du Royaume ne se dément pas.
La conférence « Maroc médiéval » à la British Academy : ce qu’il faut savoir
Le 27 novembre prochain, un événement d’envergure se tiendra à Londres : une conférence intitulée « The making of medieval Morocco », animée par l’éminente professeure d’archéologie Corisande Fenwick de l’University College London. L’objectif est de présenter un éclairage nouveau sur la manière dont les premiers États islamiques ont émergé au Maroc, en s’appuyant sur des preuves archéologiques inédites : poteries, verreries, monnaies et autres objets issus de fouilles récentes. Ces découvertes permettent de reconstituer non seulement les grandes manœuvres politiques, mais aussi les réseaux commerciaux et la vie quotidienne d’une époque foisonnante.
Corisande Fenwick : l’archéologie du quotidien
L’approche de la professeure Fenwick est particulièrement novatrice. Comme le souligne la présentation de l’événement, son travail vise à dépasser l’histoire traditionnelle des dirigeants et des élites. Elle cherche à comprendre comment vivait la majorité de la population. En analysant les vestiges matériels, elle redonne une voix à ces anonymes qui ont, par leur travail et leurs échanges, participé à la construction du Maroc médiéval. Cette conférence à la British Academy sur le Maroc médiéval promet donc une vision plus humaine et complète de cette période fondatrice.
Des Idrissides aux Mérinides : la naissance d’un empire
Le Maroc médiéval est l’œuvre de plusieurs grandes dynasties berbères qui, entre le VIIIe et le XVe siècle, ont unifié le territoire et l’ont imposé comme une puissance incontournable. Après les Idrissides, qui fondèrent Fès, les Almoravides, venus du Sahara, établirent leur capitale à Marrakech en 1062 et étendirent leur empire jusqu’en Andalousie. Leurs successeurs, les Almohades, puis les Mérinides, continuèrent de structurer le royaume, affirmant une identité politique et culturelle forte, distincte du califat oriental.
Fès, Marrakech, Rabat : des villes-symboles nées de cette ambition
Chacune de ces dynasties a laissé une empreinte physique et architecturale indélébile. Elles ont fondé ou magnifié des capitales dont le rayonnement intellectuel, spirituel et artistique était immense. Les mosquées, les médersas (universités coraniques) et les palais érigés à cette époque ne sont pas de simples bâtiments ; ils sont le témoignage en pierre et en zellige d’une ambition politique et d’une vision du monde.
L’héritage dans nos murs : quand l’art médiéval inspire aujourd’hui
Le legs le plus vibrant de cette époque n’est pas seulement conservé dans les musées. Il réside dans un langage esthétique et un ensemble de savoir-faire qui continuent de s’exprimer avec une vitalité surprenante.
La grammaire du zellige, du bois et du stuc : un langage toujours parlé
L’exemple de la Madrassat Al Attarine à Fès, construite par les Mérinides, est saisissant. La « dentelle de bois » des panneaux de cèdre sculpté, la complexité mathématique des motifs géométriques du zellige et la finesse calligraphique du plâtre ciselé témoignent d’une maîtrise artistique exceptionnelle. Ces savoir-faire, développés et perfectionnés à l’époque médiévale, n’ont jamais disparu. Ils sont devenus la signature de l’artisanat d’art marocain, transmis de maâlem (maître artisan) en apprenti, et sont toujours pratiqués avec une virtuosité intacte.
Des riads aux créateurs contemporains : une esthétique réinventée
L’influence de cette période va bien au-delà de l’artisanat. L’architecture même des riads, avec leur patio central, leurs fontaines et leur conception tournée vers l’intérieur, est un héritage direct du Moyen Âge. Cet art de vivre, qui privilégie l’intimité et la fraîcheur, inspire aujourd’hui des architectes et des designers du monde entier. Le langage esthétique médiéval, loin d’être figé, est constamment réinterprété dans le design contemporain, la mode et même l’art.
Un pont entre passé et présent
La conférence sur le Maroc médiéval à la British Academy est bien plus qu’un simple rendez-vous académique. C’est une invitation à redécouvrir les racines profondes d’une culture dont la créativité, née il y a plus de mille ans, continue d’irriguer le Maroc moderne. L’archéologie nous donne les clés scientifiques pour comprendre le passé, mais ce sont les artisans, les architectes et les créateurs d’aujourd’hui qui gardent cet héritage vivant et pertinent. L’intérêt international pour le Maroc médiéval, manifesté par un événement au sein de la British Academy, en est la plus belle preuve.

